mardi 16 juin 2009

lundi 15 juin 2009

lundi 24 novembre 2008

Face à face avec la verticalité

Photo tirée du spectacle "Ivre d'équilibre"

Article de presse

Taille de policeArticle paru après mon passage au festival d'humour et de création de Villars-De-Lans. A mon grand étonnement mon spectacle "Ivre d'équilibre" (à l'époque le titre était "De l'autre côté de la colline") a remporter le seul prix du festival à savoir le prix du public.

Voici un mail reçu d'une spectatrice de cette soirée :

Bonjour,

J'ai vu votre spectacle avant hier à Villard de lans. Magnifique. 

Ce fût pour moi un voyage. Un voyage qui va chercher ses racines, qui se nourrit de la pierre, de l'énergie tellurique qui vibrait avant le soleil. Un voyage qui vous mène de la profondeur des origines jusqu'à l'espace  aérien et léger où le monde se dissout dans l'immensité de l'espace. 

Au commencement, il y avait le verbe, et le verbe était vibration. Un cri. Qui  planait au-dessus des eaux. Une lumière s'allume sur la scène. Une ombre bouge. On devine la silhouette d'une vieille charrette. Et puis, une forme drapée, majestueuse fait son entrée. Femme ou homme? Être atemporel. La forme glisse en silence. La forme c'est vous. Incarnation de Shiva. Force et beauté. Mouvement et silence. Un cri immobile. Vos opposés tenus en équilibre.

Au commencement il y avait vous. Votre danse céleste. Vos mains qui sculptent le pierre. Qui vont  la déterrer des tréfonds de notre mère, la terre. Pour ériger des cathédrales. Pour jouer avec les lois de l'apesanteur. Pour défier l'équilibre. Vous sculptez le monde de vos mains. Et puis, vous nous emmenez de pays en pays, d'époque en époque.

Troubadour du moyen-âge qui tire sa charrette. Samouraï noble et magnifique qui cherche dans son sabre le voie de son Esprit. Danseur acrobate qui joue avec une chaise pour arrêter le temps. Car la chaise c'est l'attente, l'immobilité. La mort peut-être. Et le temps coule et coule encore. Vous avez invité Kali à vos côtés. Maîtresse redoutable, elle vous accorde la grâce de son sablier. Le temps s'écoule. Et pourtant, vous, vous l'arrêtez. Les grains de sable tombent sans répit, poussière d'hommes. Et vous jouez quelques instant avec leur souvenirs. Pluie de lumière qui disparaît dans un soupir. Et alors le désir se fait plus intense. Vous vous éloignez. Vous érigez le mât. Pôle universel qui reliait jadis les chamanes de ce monde à l'autre. Et là, la bataille, douce et violente commence. La danse d'amour et de désespoir. Le désir d'atteindre cette cîme éloignée. De grimper toujours. La détresse de l'Esprit emprisonné dans un corps. Et là, c'est votre corps qui va aider l'Esprit à se libérer.

Avec passion. Avec violence. vous tournez autour du mât qui se perd dans le ciel. Vous vous jetez, vous glissez, vous recommencez. et finalement dans un spasme d'extatique, vous vous hissez jusqu'à toucher le sommet... quelques instants seulement avant de retomber, et de comprendre qu'il faut trouver un autre chemin. Alors les rafales sauvages des origines déferlent dans la salle. Alors nous sommes à nouveau au commencement. Devant nous, il ne reste de la terre qu'une nébuleuse bleue qui se dissout dans le lointain passé des origines. Le hurlement du vent.

Un fil.

Et un être magique, mystique, qui tente la traversée. Qui tente de franchir le pont entre notre monde  et celui des Dieux.. Ce pont qui se balance au-dessus du fleuve de l'oubli. Et nous spectateurs ébahis, nous nous sommes oubliés avec vous. Le temps s'est arrêté. Personne ne respire et tous, nous sommes suspendus à votre corps, flamme blanche bercée par les vents, magnifique d'aisance et de légèreté, votre regard lumineux fixé sur le sommet, majestueux, éternel.

Pas à pas, vous avancez dans la tempête de la vie. Pas à pas, vous franchissez le pont. Ce lien qui nous sépare de ce que nous pourrions être.

"Parrati demande à Shiva : Pourquoi as-tu crée le monde?

Shiva répond : Parce que je voulais savoir comment c'était d'être en ayant oublié qui je suis."

Sur le fil, vous nous ramenez aux origines. Et là haut, nous respirons un instant un bref instant de répit et de béatitude.

Mais la quête n'est pas achevée. L'Esprit n'est pas encore libéré. Emprisonné des sens, il faut encore trouver un autre moyen, un autre chemin. Il faut se retirer encore plus loin. A l'intérieur. Loin du bruit et de la lumière. Dans l'obscurité de l'être pour y découvrir les moyens d'ascension, le chemin de la libération. Vous cherchez ce chemin. Et soudain, après un combat avec cette chaise, vous décidez de le tenter. Vous vous bandez les yeux. Fermé à la tromperie de sens, Maya dans ce monde, illusion cosmique qui voile la conscience, vous poursuivez votre quête avec vos propres mains. Les chaises de l'immobilité se transforment en échelle de vie. Evoluant dans le vaste monde qui s'ouvre à vous, dans celui que vous ouvrez en nous, vous faites glisser les chaises vers le ciel. Tour improbable érigé à la liberté. Une tour qui vous pousse plus loin en vous-même. Plus loin vers la connaissance. Vers la transcendance. Aveugle aux illusions de la vie, vous trouvez l'équilibre vertical. Et vous glissez dans les airs. Votre corps n'est plus. Enveloppe matérielle, tirée vers le haut par l'Esprit, par les ailes de la quête. Le désir de la connaissance. Et là, au sommet, l'être explose. Il est, et il n'est plus. Vous vous délivrez de l'aveuglement ultime. Vous vous asseyez. Vous nous regardez. Splendide. Aérien. Céleste. Vous tendez la main et vous trouvez le fruit de la connaissance de soi et du monde. 

Vous avez unis les pôles. Le monde interne et externe. Le plan vertical et horizontale. de la pierre au ciel. et alors, il ne reste que la vie, libre et immense. L'équilibre.

Vous redescendez et vous dansez en équilibre sur la terre. Vous empilez planches et rouleaux en défi à tous ceux qui s'accrochent encore aux illusion des apparences. Vous regardez la vie la tête en bas, les pieds tendus vers le ciel. Vous jouez avec le monde. 

Vous avez ouvert nos âmes et nos coeurs.

Vous êtes.

Un. 

Libre.

Pur Esprit.

Emmenez-nous encore de l'autre coté de la colline...


Voilà ce que j'ai vécu l'autre soir et je vous voulais vous l'écrire.

Très sincèrement.

Nicole.